Un ange passe
« Frères et sœurs, bonsoir. Vous savez que c’est le devoir du conclave que de donner un évêque à la ville de Rome. Il semble que mes frères cardinaux soient allés le chercher à l’autre bout du monde ! »
Nous étions sur la place Saint-Pierre, où le petit peuple de la Ville Éternelle s’était assemblé, lorsque Jorge Mario Bergoglio, vêtu d’une simple chasuble blanche, est apparu. Il y a 12 ans à peine, les fidèles étaient accourus de tous les quartiers de Rome pour découvrir le nouveau pape que leur avait donné ce conclave. Un pape de la simplicité, qui avait délaissé les habits d’apparat et troquerait les appartements pontificaux pour la résidence Sainte-Marthe. Selon cette même logique qui ne le quitta jamais, il sera enterré samedi à la basilique Sainte-Marie-Majeure au lieu de l’être dans les grottes vaticanes sous la place Saint-Pierre.
Ce n’est pas un hasard si, dans sa première homélie, il cita le sulfureux Léon Bloy, en qui Georges Bernanos voyait « le dernier prophète du peuple des Pauvres ». Écrivain torturé et désespéré, cet extraordinaire pamphlétaire, ami des Juifs, des femmes et des prostituées, n’a eu de cesse de dénoncer les sépulcres blanchis et l’hypocrite charité des élites de son époque.
Mais nous vivons dans un monde bien différent, où malheureusement le courage consiste souvent à tirer sur des ambulances. Pas un jour sans que l’on vitupère contre l’Église, contre les crimes sexuels évidemment réels de ses prêtres, contre son refus de l’avortement et contre les tripatouillages........
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