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«Mes» États-Unis sont passés du rêve au cauchemar

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25.03.2025

Je suis né un 4 juillet, en 1956, à Québec. C’était un moment « doré », où les États-Unis trônaient en tête du monde, avec une classe moyenne en croissance fulgurante, qui nous entraînait, les Canadiens et Québécois, dans son sillage.

Comme ma famille passait ses modestes vacances sur la côte est américaine, il se produisait souvent que mon anniversaire soit célébré par de multiples feux d’artifice. C’était grisant !

En tant qu’enfant, à cette époque, j’étais impressionné par le fait que tout était plus gros, plus grand, plus impressionnant, de l’autre côté de la frontière. À Atlantic City, ma mère m’emmenait visiter un magasin dont elle prononçait très mal le nom — elle disait « Tébere toy-Hélene », alors que c’était Tabers Toyland — où l’on découvrait d’énormes peluches et des dizaines de jouets impossibles à trouver chez nous.

Vers l’âge de 9 ou 10 ans, j’ai dit à un voisin que j’étais « américanisé » et que c’était ma plus grande qualité. Il s’est mis à pouffer de rire et m’a traité de dérangé. Convaincu de ma supériorité, je l’ai « gentiment » envoyé promener.

Mon sport préféré était le baseball, et ça l’est toujours. Je regardais le plus possible la télévision en anglais, des émissions comme Get Smart, Star Trek et The Man from Uncle bien avant qu’elles ne soient traduites en français.

Lors de ces visites à Atlantic City, au milieu des années 1960, il fallait traverser un quartier noir pour atteindre la plage. On subodorait le racisme et les inégalités, mais sans comprendre.

La réalité m’est apparue directement en plein visage le 23 juillet 1967. Ma famille campait dans le Sud-Ouest ontarien quand mon papa adoré m’a fait une surprise : il a décidé de m’emmener à Detroit, à une heure de route, pour assister à un match de baseball des Tigers. J’étais fou de joie !

Pour nous rendre au stade, il nous fallait traverser l’immense ghetto noir à l’est de Detroit. Par une chaleur accablante, des femmes avec des cheveux afros et presque nues, des hommes en bedaine buvant des bières et nous regardant avec mépris. De tout cela suintaient une pauvreté, une sensualité et un sentiment de révolte que même le jeune pubère que j’étais pouvait ressentir.

Mais le match m’a ramené dans mes États-Unis bénis. Du vrai baseball professionnel en chair et en os ! J’ai profité de chaque balle lancée et frappée.

Sauf qu’après la partie, tout a tourné au cauchemar, quand nous avons repris la route vers le Canada. On voyait de la fumée partout, des gens qui couraient dans tous les sens, qui transportaient des tas d’objets, volés dans les magasins. C’était le début de la plus violente émeute noire des années 1960. Par miracle, nous sommes........

© Le Devoir