Un pays, oui, mais quel genre?
Bien des choses avaient changé en 1995, quand les Québécois ont été invités à se prononcer sur leur avenir politique pour la deuxième fois en 15 ans. Les principaux acteurs avaient été remplacés, les échecs constitutionnels de Meech et de Charlottetown avaient ravivé la flamme nationaliste comme jamais et, surtout, l’accord de libre-échange avec les États-Unis avait créé un nouvel environnement économique.
Jacques Parizeau avait tout de suite vu qu’un accès élargi au marché américain pourrait diminuer l’insécurité qu’engendrait la crainte de voir le Québec isolé. L’association économique que le Canada avait rejetée d’entrée de jeu — le fameux trait d’union auquel tenait René Lévesque — devenait moins indispensable. On agitait encore le spectre des pertes d’emplois et d’une fuite des capitaux en cas de séparation, mais les personnes âgées pourraient au moins continuer à manger les oranges dont le camp fédéraliste les avait menacées de privation en 1980.
Trente ans plus tard, l’arrivée de Donald Trump a remis l’incertitude à l’ordre du jour, et les liens économiques avec le reste du Canada ont repris de la valeur. S’il doit y avoir un troisième référendum, le plus grand défi des souverainistes sera encore une fois de convaincre les Québécois qu’ils peuvent s’en tirer aussi bien sans lui. Ce ne sera pas une mince affaire.
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C’est bien beau de se donner un pays, mais quel genre de pays ? Aussi bien en 1995 qu’en 1980, il semblait acquis........
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