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Gloutonnerie littéraire

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13.08.2025

Ironiquement, je n’ai jamais aussi peu lu que depuis que je suis devenue éditrice, il y a trois ans. Si, comme plusieurs, je me suis tournée vers ce métier parce que j’adorais lire, j’ai vite remarqué qu’après une journée passée à l’intérieur d’un texte en chantier, dans les mots d’un écrivain, le soir, je perds l’élan qui me porte vers la lecture. Trop de mots flottent encore dans ma tête, mes yeux refusent de continuer à courir sur la page…

Ça me manque, bien sûr, et je continue d’empiler tous les livres qui me font de l’œil. C’est peut-être aussi pour cette raison que je lis plus de romans graphiques qu’avant — un repositionnement loin d’être inintéressant. Je devrais peut-être faire comme ma collègue éditrice Jade. De temps en temps, elle s’offre une journée de congé pour dévorer une nouveauté, savourer un classique ou mordre dans une pépite dénichée dans un croque-livres.

J’avais ma pile toute prête pour les vacances, mais ça m’a quand même pris un moment avant d’arriver à décrocher. Désormais, quand je lis, mon attention est accaparée par une foule de détails que je ne remarquais pas avant : une typo avec un peu trop d’empattements, un joli dos de livre qui se démarque, une coquille oubliée au passage, trop de césures, l’odeur aigrelette d’une colle, le blanc vif d’une page couverture qui jure avec la teinte plus crémeuse des pages intérieures, le nom d’une correctrice ou d’une réviseure avec qui j’aime collaborer, une lettrine qui veut qu’on la remarque, la douceur du papier « felt » et sa texture fibreuse, une tranche jaspée à la mode du jour, une nuance un peu éteinte sur une C 1 sombre… C’est fatigant.

Le premier livre dans lequel je........

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