À ceux qui restent
Cher journal, j’ai appris cette semaine le suicide d’une connaissance. Pas quelqu’un de proche, mais quelqu’un que j’avais assez croisé pour savoir qu’il était sympathique, drôle et sensible et, surtout, qu’il comptait dans la vie de gens qui, eux, étaient beaucoup plus proches de moi.
Le suicide est une profonde tragédie à cause du silence dans lequel il plonge ceux qui restent. Cette incompréhension, ce mystère, ces non-réponses aux milliers de questions qui nous assaillent. Il est affreux, aussi, parce que nous menons tous un combat — intérieur, secret, caché —, où chaque réveil est un peu une décision de ne pas baisser les bras. De ne pas simplement se laisser entraîner dans le flot torrentiel de cette vie, mais d’agir consciemment. De se tenir droit comme un draveur, les deux pieds fièrement ancrés sur sa pitoune.
J’ai appris aussi cette semaine qu’en février 1977, René Lévesque, alors nouvellement premier ministre, a happé à mort ce que l’on appelait à l’époque « un clochard ». Oui ! Il a tué au volant un sans-abri sur le chemin de la Côte-des-Neiges, et je n’ai jamais su ça. C’est lors du numéro d’humour d’un ami que je l’ai appris, mardi, dans un bar — et tu me connais, avec mon niveau de curiosité, je me suis empressée d’aller lire tous les journaux de l’époque disponibles dans les archives.
La victime était un monsieur........
© Le Devoir
