Les gros cactus
À la radio de nos impôts, il était question, ces jours derniers, d’emplois en apparence inusités. « Directeur du bonheur » ou encore « directrice de la bienveillance ».
Ce sont des professions qui ont émergé, sous différents noms sucrés, dans plusieurs entreprises. Des emplois inspirés par des pratiques managériales issues de la Silicon Valley. En particulier du géant Google.
Une chaîne de restauration au Québec compte, selon ce modèle, sur une « directrice de la bienveillance », rapporte Radio-Canada. On l’entend se raconter au micro, le sourire dans la voix. Elle révèle un de ses récents conseils aux employés : cesser de considérer l’actualité. Elle les invite à se détourner des journaux, tout comme des réseaux sociaux, afin de neutraliser la colère, l’angoisse, les craintes et les frustrations qui germent avec la mauvaise conjoncture actuelle.
Au nom des apparences d’une bienveillance, ce paternalisme classique affirme l’intérêt des entreprises à formater leurs employés de sorte qu’ils se concentrent sur leurs opérations. Les questions de société se trouvent, pour les compagnies, avantageusement enserrées puis broyées dans l’étau de velours des seules perspectives individuelles. Ce discours doucereux sur le bonheur personnel permet de supplanter des discussions sur la justice et la solidarité.
Cette stratégie malaisante, bordée de projections psychologisantes, consiste à vous détourner de la réalité pour vous faire croire que tout repose sur l’individu, jusqu’à s’aveugler sur le pouvoir de celui-ci. Ce qui conduit à ce que l’on nommait, en d’autres temps, « faire........
© Le Devoir
