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Aller-retour pour Toronto

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23.04.2025

Le caricaturiste Robert LaPalme avait à peu près la même petite taille que Toulouse-Lautrec, cet affichiste de génie qui inspirait en partie ses dessins désinvoltes de caricaturiste au Devoir. Lorsque, à l’occasion, je sortais en ville avec mon vieil ami LaPalme, il se montrait toujours bien mis, avec sa canne à pommeau d’argent et son éternel nœud papillon accroché au col de sa chemise. Son élégance de dandy, rigoureusement entretenue, le situait en marge du temps. Avec moi si grand à ses côtés, nous formions une sorte de duo improbable à la Mutt and Jeff, les personnages de Bud Fisher dont il collectionnait les originaux.

Un de mes dessins préférés de LaPalme reste un autoportrait réalisé en 1954. LaPalme s’y montre en plein cœur de Paris, l’air complètement ahuri, un verre à la main, la mine basse. Il est assis sur une chaise du Café de Flore, lieu emblématique de la vie parisienne. Les pieds de LaPalme ne touchent pas à terre tant il est petit. Pour faire contraste, il s’est représenté minuscule, entre deux longues jeunes femmes, tout en jambes et en rondeurs. Derrière, sur une colonne Morris, il est question d’« ardents désirs », des Folies Bergère, de Gina Lollobrigida… Un serveur passe, tout sourire. Un gendarme à l’air circonspect jette un œil discret. Tout autour, la vie pétille. La tour Eiffel et Notre-Dame apparaissent. Et LaPalme, au milieu de toute cette scène joyeuse, apparaît abattu, déprimé, absent, les yeux pochés, la larme à l’œil. À quoi pense-t-il donc pour paraître avec cette tête d’enterrement ? La légende du dessin nous le dit : «........

© Le Devoir