Qui a l’oreille de la ministre des Forêts?
Depuis le dépôt du projet de loi 97 sur la réforme du régime forestier, les critiques fusent de toutes parts. Premières Nations, syndicats des travailleurs de la forêt, groupes environnementaux, acteurs du récréotourisme, fédérations des zecs, des pourvoiries, des chasseurs et pêcheurs ainsi que des activités de plein air, biologistes, scientifiques, ingénieurs forestiers, groupes citoyens, villégiateurs : tous sont grandement inquiets de cette réforme.
La ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, semble jusqu’à maintenant peu se soucier de ce vent d’opposition et justifie sa réforme en affirmant qu’elle serait issue d’une « vaste consultation » des différents acteurs du milieu forestier. Pourtant, nous sommes ces acteurs et la démarche de « consultation » qui a été menée nous laisse un goût bien amer en bouche.
C’est parce que cette démarche n’a pas mis en place les conditions gagnantes pour trouver une vision commune. Est-ce qu’on a pu dire ce qu’on pense ? Oui. Est-ce qu’on a pu travailler ensemble à trouver des solutions concrètes ? Non. Même si toute décision gouvernementale amène nécessairement des points de vue divergents, des consensus pourraient émaner entre les différentes visions si le ministère des Forêts misait sur la transparence et offrait un espace d’échanges constructifs.
À la place, on nous a offert des forums où chacun avait seulement quelques minutes pour s’exprimer. On nous a ensuite présenté un rapport résumant la démarche de laquelle aucune ligne directrice n’a pu découler. Après ce processus expéditif, nous avons eu droit à un silence radio de plusieurs mois, pendant lesquels le ministère s’est affairé à rédiger les grandes lignes du projet de loi 97. Pendant cette période, qui a été consulté ?
On sait que ce ne sont ni les scientifiques ni les experts qui étudient les forêts depuis des décennies. Christian Messier, chercheur souvent cité pour justifier l’utilisation du concept de zonage en triade, n’a pas été consulté pour commenter le projet de loi. Il en est aujourd’hui l’un des critiques, et affirme que la triade ne doit pas être mise en place avec comme principal objectif d’aider l’industrie forestière, comme cela a été présenté par la ministre.
Ce ne sont pas non plus les ingénieurs forestiers du ministère qui ont été consultés. Sous le couvert de l’anonymat, certains ont osé dénoncer le fait que leur expertise n’a pas été sollicitée dans la rédaction du projet de loi.........
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