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CRISE DE L'ESR / CONTRIBUTION 4 - Pour s’affranchir des États-Unis, l’Europ...

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La France et les pays de l’Union européenne connaissent depuis plusieurs décennies une importante fuite de leurs cerveaux vers les États-Unis. Plutôt que de prétendre accueillir les chercheurs et universitaires états-uniens victimes des purges de leur Président, la France devrait, dans un cadre européen renforcé, offrir des possibilités d’emploi à ses jeunes universitaires et chercheurs à hauteur de leurs qualifications.

Le président des États-Unis mène un combat idéologique contre les universités et organisations de recherche les plus renommées. Il les menace de les priver de subventions fédérales si elles n’excluent pas de leurs enseignements et recherches des sujets tels que la diversité, l’équité ou l’inclusion. Des agences scientifiques fédérales spécialisées dans l’étude du changement climatique et de la santé sont particulièrement ciblées et ont déjà dû renoncer à certains programmes de recherche et licencier, ou ne plus embaucher, de personnel scientifique. Il n’en fallait pas plus pour que certains médias imaginent que la France et l’Europe pourraient accueillir les universitaires et chercheurs américains expatriés en masse de leur pays. Ce mouvement pourrait alors donner un essor nouveau aux universités et à la recherche française et européenne dans la compétition avec les grandes puissances scientifiques mondiales.

L’université d’Aix-Marseille, qui a défrayé la chronique, a débloqué une quinzaine de millions d’euros pour accueillir, pendant 3 ans, 15 chercheurs américains. Pourtant, ce montant est sans commune mesure avec les enjeux états-uniens. Par exemple, la menace que fait peser le gouvernement sur la seule université d’Harvard est de supprimer une subvention de 2,2 milliards de dollars (2 milliards d’euros). Surtout, depuis le début du siècle, la France a perdu du terrain par rapport à tous les grands pays développés en termes de ressources consacrées à la recherche et au développement (R&D). Dans ce domaine, les données de l’OCDE incluent, outre les financements des entreprises, et des grands organismes publics de recherche (CNRS, Inserm par exemple pour la France), les financements (publics et privés) que les universités consacrent à la recherche scientifique. Pour notre pays, la totalité de ces financements représentait 2,10 % du PIB en 2000. Ils ont stagné depuis cette date et se montent à 2,19 %, en 2023. Dans le même temps, les 35 pays de l’OCDE sont passés de 2,10 % à 2,70 % et les États-Unis de 2,62 % à 3,45 %. De plus, la France est en voie de déclassement à l’intérieur même de L’Union européenne (UE), alors que cette dernière est elle-même à la traîne par rapport aux autres grandes puissances scientifiques. Les 27 pays qui consacraient en moyenne 1,68 % de leur PIB à la R&D en 2000, sont passés à 2,13 % en 2023. La France se situe donc aujourd'hui juste au niveau de la moyenne de l’UE.

En mai 2025 lors de la conférence Choose France et Choose Europe, le président de la République française et la présidente de la Commission européenne ont annoncé une participation du budget français et du budget européen de quelques centaines de millions d’euros, étalés sur plusieurs années, afin de « faire de l’Europe un pôle d’attraction pour les chercheurs et universitaires étrangers ». De plus, l’objectif de 3 % du PIB consacré aux investissements en R&D à l’horizon 2030, pour l’UE considérée globalement, a été fixé par Mme von der Leyen. Pour la France, ce passage à 3 % du PIB signifierait que l’ensemble de ses ressources publiques et privées consacrées à la R&D passerait de 62 milliards d’euros en 2023 à 85 milliards en 2030.

L’immigration importante de scientifiques venus des États-Unis vers la France, et plus généralement vers l’Europe, ne se produira pas à court ou moyen terme. En effet, le retard accumulé par la plupart des pays européens, et en particulier la France, ne pourra être comblé en quelques années. Bien plus, nos gouvernants semblent oublier que l’insuffisance des ressources consacrées à l’enseignement supérieur et à la recherche scientifique ont entraîné le départ de nombreux Européens vers les États-Unis. Un objectif réaliste pourrait être d’enrayer l’expatriation vers l’étranger, et spécialement vers les États-Unis, des........

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