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Dirigeantes sous pression : comment le féminisme néolibéral alimente le syndrome de l’imposteur

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Les dirigeantes d’aujourd’hui sont célébrées comme des « girlboss » capables de tout concilier : carrière, famille et ambition personnelle. Mais derrière cette façade se cache une pression invisible : le féminisme néolibéral impose l’auto-optimisation et la performance sans répit, donnant naissance à un nouveau « syndrome de l’imposteur » où jamais rien n’est assez. Enquête auprès de femmes qui occupent des postes à responsabilité dans le secteur du luxe en France.

De nos jours, les médias célèbrent souvent la « girlboss », cette entrepreneuse qui travaille 80 heures par semaine pour développer sa marque et réussir, tandis que des campagnes publicitaires montrent des femmes qui « s’imposent » dans les salles de réunion et dont la vie de famille est réglée comme du papier à musique. Ces représentations culturelles créent l’illusion que les femmes occupant des postes de direction sont plus autonomes que jamais. Pourtant, nos recherches révèlent que certaines se disent épuisées, enfermées dans des attentes et poussées à incarner un idéal qui ne tolère guère la vulnérabilité. Cette tension renvoie à une forme de féminisme relativement récente, qui n’est sans doute pas aussi libératrice qu’elle le suggère.

L’expression féminisme néolibéral a été introduit pour la première fois en 2013 par Catherine Rottenberg, spécialiste des médias et des études culturelles.

Rottenberg l’a utilisé pour décrire la fusion progressive d’un certain type de féminisme centré sur les libertés individuelles, et la rationalité néolibérale. Le néolibéarlisme étant défini, selon la théoricienne politique Wendy Brown, comme un ordre de la raison normative qui « reconfigure tous les aspects de l’existence en termes économiques »

Ce courant du féminisme reconnaît la persistance des inégalités entre les sexes, en particulier dans le monde du leadership dominé par les hommes, mais attribue la responsabilité de les surmonter aux femmes elles-mêmes, les exhortant à devenir la version la plus performante d’elle-même et à affirmer constamment leur valeur. Mais derrière cette responsabilité se cache une nouvelle forme de pression : celle de ne pas seulement affirmer leur valeur auprès des hommes, mais aussi auprès des autres femmes. Cette pression ne provient pas du patriarcat traditionnel, mais des préjugés intériorisés par les femmes. Elle alimente ce que nous appelons, en combinant des termes issus de la littérature populaire et académique, le « phénomène de l’imposture de la superwoman » : un sentiment d’insuffisance causé par des attentes contradictoires et........

© The Conversation