Jeux : du ludique au sérieux… et la ludification de la société
Depuis des siècles, le jeu, en tant qu’outil ou activité, a été pensé pour la formation des jeunes enfants, mais aussi des militaires. Ce phénomène s’est consolidé durant les XIXe et XXe siècles (Goria, 2025). Des activités de jeux et même des kits dédiés, tels que ceux de Friedrich Fröbel (Proutière, 2024) ont ainsi été spécifiquement conçus pour accompagner l’apprentissage et en ont inspiré bien d’autres. Ce sont de premiers jeux sérieux qui relèvent de la catégorie des jeux ludo-éducatifs et qui prennent place dans un ensemble d’activités actuellement appelé : ludopédagogie (Alvarez, 2025). Parallèlement, des jeux de guerre sur plateau et/ou avec figurines créés pour assister la formation et la réflexion des militaires ont commencé à être employés dans les armées prussiennes pour se généraliser rapidement à l’échelle mondiale. Ces jeux de guerre professionnels forment une autre catégorie de jeux sérieux et sont appelés : wargames (Llobet, Claverie, 2023).
Ces deux courants de pensée visant à inclure, lorsque cela peut être utile, le jeu dans des activités utilitaires se sont peu à peu étendus à d’autres champs. C’est ainsi que des jeux d’initiation à la gestion d’entreprises ont été développés pour former les futurs entrepreneurs et cadres. De même, l’univers de la santé s’est enrichi de nouvelles pratiques de jeu qui ont elles-mêmes encouragé le détournement de jouets, tels des poupons pour simuler des soins à des bébés, par exemple (Goria, 2025). Dans un registre proche, des jeux de rôles thérapeutique et jeu de rôles d’entreprise où des salariés jouent le rôle d’une personne face à une situation spécifique ont été utilisés dès le début du siècle dernier. Ils ont été complétés par d’autres activités inspirées du jeu ou faisant appel au jeu, tel que : des jeux de construction ou consolidation d’équipe (team building), des jeux de socialisation destinés le plus souvent à préparer à une activité de groupe portant le nom évocateur de brise-glaces (icebreakers), des jeux de rôles destinés à simuler des confrontations sur des marchés nommés business wargames, car leurs mécanismes sont inspirés de leurs équivalents militaires, des jeux vidéo destinés à simuler des tâches, à apprendre ou tester des connaissances, etc.
Bien entendu, le jeu peut être à la fois loisir et utile. C’est une question d’usage et de point de vue. Ainsi, les loteries, jeux de paris et toutes les formes de jeux d’argent, comme de jeux spectacles, sont proposés comme divertissement pour un public, mais comme un moyen de gagner de l’argent, d’influencer ou, désormais, lorsqu’ils sont numériques, de collecter des données à des fins commerciales. L’expression « du pain et des jeux » du poète romain Juvenal est ainsi toujours d’actualité.
Alors qu’en est-il actuellement de la place des jeux au sein de la société ? Le jeu peut être employé pour ce qu’il est d’abord, c’est-à-dire un outil de divertissement. Cela n’exclut pas une face cachée utilitaire propre à cet usage. D’ailleurs,........
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