L’IA tuera-t-elle l’école?
L’intelligence artificielle (IA) produit désormais tous les savoirs à la demande, structurés, sourcés, indéfiniment paramétrables. Au point que la plupart des jeunes se demandent s’ils doivent encore apprendre quoi que ce soit. Car après avoir accumulé le savoir dans des encyclopédies et l’avoir diffusé dans un réseau mondial, nous l’avons automatisé dans des applications. On a appris, fait apprendre, externalisé l’apprentissage, de sorte que l’apprentissage humain paraît aujourd’hui aussi absurde que les porteurs d’eau à l’heure des canalisations.
Dans un passage de Notre-Dame de Paris intitulé « Ceci tuera cela », Victor Hugo annonce la fin de l’architecture, « écriture principale de l’humanité » jusqu’à Gutenberg, remplacée par le livre dans son rôle de vecteur culturel et social. La cathédrale scolaire sera-t-elle aujourd’hui supplantée par les algorithmes de l’IA ?
En réalité, dès le départ, le savoir paraît souvent inutile à l’ignorance, parce qu’il est en avance sur les besoins instinctifs. Les uns vont droit au but, l’autre fait un détour incertain. Opposition entre logiques biologique et cognitive qu’il a fallu dépasser pour enclencher l’avancée de la civilisation, et qu’il faut dépasser à chaque génération d’enfants qui demandent à quoi servent des connaissances dont ils ne font pas immédiatement usage, qu’il s’agisse de tables de multiplication (il y a des calculatrices), d’histoire (c’est du passé), de biologie (je ne veux pas être biologiste), de philosophie (c’est théorique), etc. Décalage entre l’utile et le connaissable qui est à l’origine de tous les types de rejets de........
© Le Devoir
