menu_open Columnists
We use cookies to provide some features and experiences in QOSHE

More information  .  Close

La misère du monde

4 0
13.04.2025

Lorsque la « misère du monde » atteint nos portes, elle n’y est pas « dompée » comme un sac de déchets sur le seuil. Pas plus qu’elle ne peut être contenue comme on le faisait au Moyen Âge, soit en jetant une bassine d’huile chaude du haut d’une fortification sur les assaillants. Elle est la résultante d’un sinistre enchaînement de choix et de renoncements, de différences et d’indifférence, de spéculations économiques et de prédations capitalistiques… et d’images projetées par une lentille populiste et déformante.

Le phénomène est aujourd’hui probant aux États-Unis, où l’instrumentalisation de la migration et les atermoiements (pluridécennaux) des législateurs sur les questions migratoires vulnérabilisent désormais la capacité de rebond d’une nation aux prises avec une guerre commerciale qu’elle s’est elle-même infligée.

Tenu il y a moins de trois semaines, alors que le pays est aux prises avec une véritable mutation politique et constitutionnelle, un sondage AP-NORC confirmait que c’est encore dans le domaine de l’immigration que le président récolte le plus de soutien.

Ce sentiment permet au président actuel d’avoir les coudées franches pour poursuivre les politiques d’expulsion de ses prédécesseurs, et les pousser plus loin vers ce qui relève bien d’un processus de déportation : de l’internement dans de véritables usines carcérales privées aux États-Unis, puis à Guantánamo, à la sous-traitance de la détention dans des goulags au Salvador ou des camps aux marges de la jungle du Darién, le gouvernement restaure la logique des bagnes, effaçant littéralement des êtres humains de l’espace public, en les faisant disparaître dans des espaces liminaux, et en usant pour ce faire d’un rapport de force avec des États qui subissent le pouvoir des États-Unis depuis plusieurs décennies.

À mi-chemin entre clientélisme et prédation, la géopolitique régionale et la politique nationale se tricotent ensemble, aux dépens des êtres humains.

Or, même s’il fallait mettre toute humanité de côté, s’il fallait réduire des hommes, des femmes et des enfants à des chiffres,........

© Le Devoir