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La haine ordinaire

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08.06.2025

Vous m’excuserez du retard, mais je ne décolère pas : le 27 mai, à Brossard, un homme de 46 ans armé d’une camionnette, Luigi Fragomele, a foncé sur une femme, Caroline Derome, qui avait installé son campement en bordure de rue.

Hospitalisation, opération, cheville broyée. Stupéfaction du public et vague de solidarité envers cette mère de famille qui, depuis environ un an, traversait une période de précarité résidentielle. Fragomele fait désormais face à des accusations criminelles.

À sa sortie de l’hôpital, Caroline Derome a accordé des entrevues. La cause de son glissement vers l’itinérance, lui a-t-on demandé sur les ondes de Radio-Canada ? Réponse sans équivoque : la crise du logement — le logement inabordable, plus précisément. Le glissement a été progressif, explique-t-elle : départ contraint d’un logement relativement abordable, puis une perte d’emploi et l’impossibilité de se reloger, surtout avec des enfants. Sans domicile fixe, donc, elle se disait malgré tout chanceuse de pouvoir compter sur le soutien de ses proches bien logés.

La trajectoire est tragiquement typique : quelques bosses sur la route et tout déraille.

Lorsqu’on parle d’itinérance, on se concentre généralement sur deux choses : sur la meilleure manière de « sortir les gens de la rue », ou bien sur les stratégies pour rendre plus harmonieuse la cohabitation entre les personnes domiciliées et non domiciliées. On s’intéresse peu à ce qui vient avant le campement, à l’expérience de........

© Le Devoir