« Refuser le terme d’islamophobie est d’une grande violence symbolique » : entretien avec le sociologue Julien Talpin
Le sociologue Julien Talpin revient sur la minimisation du racisme anti-musulmans en France, après le meurtre d’Aboubakar Cissé, jeune Malien tué dans la mosquée de La Grand-Combe, vendredi.
Trois jours après le meurtre d’un jeune Malien dans la mosquée de la commune gardoise de La Grand-Combe, une information judiciaire a été ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion, a annoncé, lundi 28 avril, la procureure de la République de Nîmes, tandis que le principal suspect du meurtre, un jeune homme d’une vingtaine d’années, s’est rendu dans un commissariat en Italie la veille au soir. Le sociologue et chercheur au CNRS, Julien Talpin, revient sur la montée du racisme anti-musulmans et le « deux poids deux mesures » des réactions politiques.
Comment se caractérise l’islamophobie ? Existe-t-il une spécificité en France ?
Julien Talpin
Sociologue, directeur de recherche au CNRS
C’est un phénomène international, global, qui a fortement augmenté après le 11 septembre 2001. On pourrait citer comme exemple Trump, qui lors de son premier mandat, relaie des vidéos islamophobes d’extrême droite ou qui banalise l’islamophobie après l’attentat de Christchurch en Nouvelle-Zélande…
Malgré tout, ce phénomène connaît une intensité particulière en France1. Même si les enquêtes comparatives sont difficiles, il s’avère que les déclarations de discriminations en raison de la religion musulmane restent particulièrement importantes dans notre pays. Ce qui peut être relié à différents facteurs. La France représente le pays européen qui compte la population de confession musulmane la plus importante. Elle a été l’un des pays européens le plus touchés par le terrorisme islamiste. Ce qui a aussi contribué à la crispation autour de ces enjeux.
Enfin, le cadre laïc français, s’il ne génère pas mécaniquement de........
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