Raphaël Pitti, médecin humanitaire : « Face au génocide à Gaza, la seule réponse possible est la désobéissance civile »
Témoin des horreurs de Gaza, le médecin humanitaire Raphaël Pitti dénonce un génocide en cours, entretenu par le blocus total qui étouffe l'enclave palestinienne. Il alerte sur la famine, l’effondrement du système de santé, et appelle à la désobéissance civile pour protéger le droit humanitaire international.
Présent à Gaza en janvier et mai 2024, Raphaël Pitti, médecin urgentiste spécialiste des zones de guerre, dénonce un génocide en cours. Après avoir témoigné publiquement, il se heurte aux refus d’entrée dans l’enclave par les autorités israéliennes.
Il poursuit son engagement à travers un collectif d’ONG et des actions locales à Metz, où il est élu chargé de l’accueil des réfugiés. Pour lui, témoigner est une obligation éthique face à l’inaction de la communauté internationale. Il appelle à une désobéissance civile pacifique face au crime contre l’humanité.
Vous êtes l’un des rares témoins directs de la situation à Gaza, alors que l’enclave est fermée aux journalistes. Comment était la situation à l’hôpital de Khan Younès lors de votre visite en janvier et mai 2024, avant le blocus total qui sévit depuis plus de deux mois ?
La situation à l’hôpital était chaotique, avec un manque criant de moyens. On faisait face à des urgences classiques, d’infections, de pathologies chroniques face à la pénurie de médicaments, et aux victimes des bombardements et des snipers. C’était une confusion totale, nous étions au sol en train de réanimer des patients. Plus de 900 patients étaient hospitalisés, alors que la capacité était de 600. Près de 3 000 personnes attendaient dans les couloirs.
Nous étions contraints à un « tri médical inversé ». Faute de moyens, les blessés graves ne pouvaient être pris en charge en premier. Leurs blessures n’étaient pas forcément mortelles, mais le manque de moyens et les bombardements empêchaient tout traitement adapté. C’était une véritable souffrance sur le plan éthique car nous étions forcés de laisser mourir les blessés les plus graves, sans même pouvoir les accompagner dans la mort avec de la morphine.
Je me souviens d’une femme de 24 ans, enceinte, diabétique depuis l’enfance, arrivée dans le coma faute d’insuline, affaiblie par la faim et incapable de contrôler sa glycémie. Elle a perdu sa petite fille de 7 mois. Sa pathologie, grave mais simple à........
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