De l’informel au formel : les communautés produisent de connaissances, l’en...
Dès 1986, dans son célèbre ouvrage Complex Organizations (1986, McGraw-Hill), Perrow suggère que nous vivons dans une société d’organisations dont les caractéristiques remettent en question ces mécanismes d’organisation traditionnels. Ainsi, la nouvelle vision de l’entreprise considère celle-ci comme une entité sociale dotée à la fois d’une dimension d’inclusion formelle et d’une dimension informelle et émergente fondée sur les liens interpersonnels de ses membres. Plusieurs auteurs soulignent l’enchevêtrement complexe et changeant de ces relations et conseillent de prendre en compte ces deux aspects pour avoir une compréhension complète de l’organisation (McEvily, Soda, Tortoriello, 2014).
Alors que la dimension formelle des organisations (systèmes de contrôle et d’incitation, structure d’autorité pour arbitrer les conflits, aménagement d’espaces de négociation) est garante de la fiabilité et de la reproductibilité des procédures et des routines, les structures organiques et informelles sont associées à la flexibilité, l’innovation et à la création de nouvelles connaissances (capitalisation de bonnes pratiques, résolution de problèmes, développement de nouvelles idées). La littérature sur les communautés de connaissances (p. ex. Amin, Roberts, 2008) propose que la création et le développement de nouvelles connaissances ont lieu dans des communautés considérées comme des structures informelles, tandis que la mise en œuvre et la systématisation des connaissances qu’elles produisent sont effectuées dans des structures formelles. Ces communautés de connaissance sont des groupes de personnes liées par des intérêts, des pratiques ou des passions communes, qui interagissent et échangent des informations régulièrement, principalement de manière informelle et non organisée, et en dehors des lignes d’autorité habituelles.
Ces communautés sont décrites comme des moyens efficaces de favoriser : l’apprentissage individuel et collectif, la résolution collaborative de problèmes, l’innovation collaborative et l’innovation sociale, grâce au partage et à la création de connaissances (Brown, Duguid, 1991).
La séparation des tâches cognitives entre les structures formelles de l’entreprise et ses communautés de connaissances soulève la question de savoir comment les deux sont coordonnées. Quels sont les mécanismes permettant aux connaissances générées dans les communautés d’être validées et appropriées par la structure formelle de leur organisation ?
Le problème de la combinaison et de l’adaptation des logiques managériales et communautaires implique de gérer l’équilibre délicat entre l’auto-organisation et le contrôle. L’enjeu est d’éviter le risque de tuer la production de nouvelles connaissances, tout en préservant l’autonomie et le fonctionnement interne des communautés. Les difficultés d’intégration peuvent également être liées au manque d’alignement des productions communautaires à la stratégie d’entreprise ou à une différence de sens accordé à l’innovation : la communauté peut aussi constituer un espace où les connaissances produites restent piégées et n’atteignent pas l’extérieur de la communauté (Goglio et al.,........
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